l’assurance construction

L’assurance construction a vécu des heures sombres : les défaillances des opérateurs intervenant en LPS (libre prestation de service) ont mis le secteur en grande difficulté. La remise en question profonde de la LPS, qui permet à une entreprise de couvrir, à partir d’un État membre de l’Espace économique européen (EEE) dans lequel elle est implantée, un risque situé dans un autre État de l’Union européenne, a permis de limiter la crise.  Mais quel bilan faut-il tirer et quels défis reste-t-il à relever ?

 

En 2018, 250 000 entreprises du BTP n’avaient plus d’assurance

Le naufrage d’opérateurs étrangers qui n’auraient pas dû être agréés et l’absence de régulation solide du marché, qu’elle soit nationale ou européenne, avait placé 250 000 entreprises du BTP dans une situation alarmante puisque celles-ci se trouvaient sans assurance. Il s’agissait ainsi d’une véritable bombe à retardement car même le FGAO (fonds de garantie des assurances obligatoires) ne pouvait intervenir

Les assureurs traditionnels ont donc essayé de replacer ces dossiers complexes : il a fallu convaincre l’assuré de racheter le passé pour ne pas laisser des trous de garanties, reconstituer le dossier technique ou obtenir les relevés de sinistralité du contrat, examiner les propositions de reprise quand les primes sont multipliées par deux ou trois… Certaines entreprises se sont même retrouvées en situation de non-assurance et dans l’impossibilité légale de souscrire un nouveau contrat tant que la compagnie n’était pas officiellement en faillite.

Des sinistres à venir et les spécificités du secteur

Si la situation vis-à-vis de la LPS s’est stabilisée, il faut pourtant aussi voir un problème plus profond dans le secteur de l’assurance construction, particulièrement marqué par le risque. On peut ainsi rappeler que les entreprises du BTP ont un avenir extrêmement fragile et qu’un tiers d’entre elles font faillite dans les 3 ans qui suivent leur création.

Les professionnels faisaient ainsi état en 2018 de 2,1 milliards d’euros de primes émises de l’assurance construction en France et de 200 millions d’euros de primes émises par les assureurs opérants en LPS, ce qui représenterait 10% des parts de marché de l’assurance construction. Pour les assurés français, la crise n’est pas encore complètement enterrée. : une partie des sinistres est encore à venir et ils ne pourront malheureusement pas tous être réglés.

L’ambition du superviseur européen : continuer l’harmonisation des pratiques

Le superviseur européen a ainsi imposé la publication de recommandations publiques sur les provisions des assureurs, avec un recensement affiné des activités à risques et une clarification du rôle des autorités de supervision.  Il a élargi les pouvoirs de l’Eiopa (Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles) afin d’être en mesure de mieux harmoniser les pratiques et de mettre un terme aux paradis prudentiels qui ont contribué aux défaillances des opérateurs. 

Reste à savoir si cette harmonisation permet de s’adapter aux spécificités nationales et notamment en France où la Responsabilité Décennale RC décennale est une garantie de long terme qui n’existe sous cette forme dans aucun autre marché européen.